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Un an après l'interruption de notre voyage par le covid...

Décembre 2019... on est au Mexique depuis 5 mois, il fait chaud, on se débrouille de mieux en mieux en espagnol et on regrette d'arriver bientôt à la fin de notre séjour dans ce pays. Dans les nouvelles sur Internet, quelques articles parlent d'une maladie mystérieuse en Chine. C'est loin, ça ne nous concerne pas. Nous, on profite du chaud et de la plage, les enfants adorent jouer dans les vagues. Notre nouvelle vie pleine d'aventures nous émerveille chaque jour et on se sent tellement chanceux de pouvoir découvrir tant d'endroits magnifiques, une culture si riche et des gens aussi merveilleux. Surtout : on croit que l'année 2020 sera absolument génial.



Janvier 2020... avec un peu de regret, on vient de quitter le Mexique et on commence une nouvelle aventure aux Etats-Unis. C'est tellement différent alors que les deux pays sont voisins ! On achète un camping car et on se lance dans ce nouveau style de vie, en imaginant déjà l'année qu'on passera dans cette maison roulante à visiter les USA et le Canada. On a du mal à se détendre, il y a tant de choses à voir et le temps semble passer si vite alors on roule beaucoup pour en rater le moins possible. La maladie en Chine s'est propagée, on entend qu'une ville entière a été confinée... on trouve cela bizarre pour une sorte de grippe, comme ils le disent... on entend quelques cas en Europe... mais c'est toujours très loin de nous et ces histoires n'ont aucune influence sur nos projets. On n'a même pas vraiment le temps d'y penser.


Février 2020... c'est incroyable ce qu'on entend de l'Europe. On parle d'une épidémie, apparemment la maladie mystérieuse chinoise a fait le voyage et nos amis et famille restés à la maison se retrouvent, presque du jour au lendemain, chamboulés par des fermetures. Nous, on est loin. Il y a aussi quelques cas, mais passant la plupart de notre temps dans la nature, loin des grandes villes, cela ne nous concerne pas. Aux USA, tout est encore normal. On continue notre périple, de plus en plus émerveillés par ces paysages à couper le souffle. Nos contacts en Suisse et en Hongrie nous racontent des choses bizarres... on ferme les écoles, les magasins... nous, on les plaint, quelle histoire ! On a jamais vu ça avant alors qu'on a déjà vécu quelques épidémies de grippe... on regrette presque d'être loin alors que quelque chose d'extraordinaire se passe chez nous ! En même temps, on est bien content d'être loin de tout ça et de pouvoir continuer notre périple sans soucis.


Mars 2020... l'ambiance change rapidement et au milieu du mois, la chose inimaginable arrive : la frontière entre les USA et le Canada est fermée ! Les gens deviennent très méfiants et distants. On voit qu'ils ont peur. Tout se ferme, les parcs nationaux, les magasins, les restaurants, même les parkings. On a du mal à trouver de la place pour dormir près des villes. On a toujours peur de se faire chasser, puisque la consigne générale est de rester à la maison. Nous, on est dans notre maison roulante, dans un pays étranger, sans rien pouvoir visiter désormais et la situation devient de plus en plus inconfortable. On a l'impression de fuir sans cesse... fuir une ville avant sa fermeture pour ne pas se retrouver bloqué... fuir un état suite à des bruits suggérant qu'il sera bientôt bouclé... arriver dans un état jusque-là ouvert et libre, pour le voir se confiner deux jours plus tard. On sent le piège se refermer de tous les côtés, on croit courir devant une vague à laquelle on a aucune chance d'échapper. On commence de s'inquiéter, on achète du désinfectant pour les mains. Loin de la société, on pense être en sécurité, puis on se rend compte qu'on est quand même obligé de faire des commissions, de mettre de l'essence... puisque peu de magasins restent encore ouverts, on va souvent dans les Walmart (grande-surface où on trouve tout), il y a plein de gens... ils commencent de limiter le nombre de personnes à l'intérieur, on se retrouve dans des fils d'attente interminables à l'extérieur... Les gens gardent la distance, attendent qu'on sorte d'un rayon pour y entrer. De plus en plus souvent, on aperçoit des armes qui ne sont plus cachés par les vêtements. L'ambiance est tendue et savoir tout ces gens armés, même dans les supermarchés, nous met mal à l'aise. Dans ces magasins, il y a vraiment tout, on ne peut pas se plaindre. Pas encore. Par contre, plus on s'approche de la côte ouest, plus on constate la pénurie... de papier (de toilette, de mouchoirs, de ménage...), d'aliments qui se gardent, de tous les médicaments contre les douleurs, la fièvre, la toux et contre tout ce qui se rapproche de plus ou de moins des symptômes de la grippe. Pure prévention, on pensait se procurer quelques médocs qui pourraient devenir utiles mais c'est trop tard. On se rend compte qu'il est impossible de toujours tout désinfecter et que si ce virus est réellement aussi dangereux, on a peu de chance de pouvoir y échapper. On se prépare à tomber malade. On est jeune, en bonne santé, apparemment on ne fait pas partie du groupe à risque, on n'a donc pas vraiment peur. Mais on se prépare à passer deux semaines très pénibles... on prépare les enfants à cette éventualité. On compte les jours à partir des moments où on était dans des endroits fréquentés... deux semaines plus tard, on soupire, soulagés, de constater qu'on a toujours rien attrapé. Ouf ! Tout va bien, on est toujours pas malade. Mais notre séjour devient très désagréable. On est dans l'insécurité totale, on ne sait pas où aller, on ne sait pas quoi faire. On évite encore plus les villes, on profite de la nature. On a presque plus aucun contact avec les locaux, ils nous évitent. Tout le monde est méfiant, tout le monde garde la distance. On s'inquiète aussi pour la suite : la frontière est toujours fermée et notre autorisation de séjour arrive à échéance mi-avril. On doit quitter le pays. On espère une ouverture rapide du Canada.



Avril 2020... les choses ne s'arrangent pas, au contraire. L'ouverture de la frontière semble de plus en plus improbable et la date à laquelle on doit partir approche très vite. On ne réalise pas encore que c'est peut-être la fin de notre voyage. On réfléchit beaucoup, on contacte l'ambassade suisse pour des conseils et des informations mais on se rend rapidement compte qu'on ne peut pas compter sur leur aide. On analyse toutes les options. S'approcher de la frontière en espérant pouvoir passer ? Les témoignages nous indiquent que cela est impossible. Essayer de prolonger notre ESTA ? Apparemment, impossible aussi, sauf si on a aucun moyen de rentrer à la maison. Ce qui n'est pas le cas, puisqu'il y a encore des avions. Redescendre au Mexique ? On hésite beaucoup à y retourner... puis on a peur des éventuelles conséquences d'une crise grave. On ne connaît pas l'avenir, on ne sait pas à quoi s'attendre. Une pandémie, une crise économique, la famine... dans un pays déjà pauvre, réputé de pas mal de violence, avec des plaques américaines on n'ose pas. Avec le recul, on aurait peut-être dû. Mais sur le moment, sans savoir ce qui allait se passer, ça faisait trop peur. On hésite même à acheter un bateau et essayer de rester dans les eaux internationales, pas loin des côtes pour pouvoir revenir dès que possible... alors qu'on a aucune expérience de navigation ! Vous pouvez imaginer à quel point on ne voulait pas admettre que la seule possibilité qui nous restait était de rentrer. En partant pour cette nouvelle vie de voyage qui devait durer au moins deux ans, on s'est dit que rien ne pouvait nous arrêter. Qu'on allait résoudre tous les problèmes rencontrés. Que si un endroit ou un pays ne nous convenait pas ou s'il y avait des problèmes, on allait changer... aller ailleurs... et parcourir le monde en trouvant toujours une solution en restant en voyage. Qui aurait pu prévoir une pandémie mondiale où tous les pays se fermeraient les uns après les autres et où on pourrait aller nulle part ailleurs que chez nous ? Cette situation était très difficile à accepter, aussi bien pour nous que pour les enfants. A peine quelques jours avant la date critique, on doit se rendre à l'évidence : on est obligé de mettre notre voyage en pause. On doit trouver un endroit, pas trop cher, pour laisser notre camping car en sécurité, trouver un avion pour rentrer en Europe... difficulté supplémentaire : à ce moment-là, on a déjà adopté un chien et il est hors de question de l'abandonner alors que la plupart des compagnies aériennes ne transportent plus les animaux. Dans le stress et l'insécurité absolus jusqu'au décollage de l'avion, on finit par arriver à Amsterdam et finalement, on prend le train pour rentrer chez nous en Suisse. On est déçu, mais en même temps content de retrouver notre famille et nos amis, notre maison... on se dit que c'est une petite pause de quelques mois et qu'on va bien profiter de ce temps, avant de repartir dès que possible.


Avril 2021... on pensait rester en Suisse 6 mois maximum... passer l'été et repartir avant l'arrivée du froid, retrouver notre camping car dans lequel on a laissé plein d'affaires (motivation supplémentaire de ne pas s'éterniser à la maison...), on pensait que toute cette histoire de covid allait finir rapidement. Une année plus tard, on est toujours à la maison. On a vécu cette année comme une sorte de parenthèse, en évitant de trop bien s'installer par peur de ne plus vouloir repartir, en évitant de se lancer dans des projets de longue durée parce que tout cela n'était que temporaire... parce qu'on allait repartir. On ne savait pas quand... bientôt. En automne, on aurait pu partir, retourner au Mexique. J'ai décidé d'attendre Noël pour pouvoir le passer avec la famille. Mes parents, mes frère et soeurs habitent en Hongrie, pays qui a fermé ses frontières le 1er septembre. J'avais tellement espéré qu'ils les ouvrent pour les fêtes ! Mais ce n'est pas arrivé. Et le temps passe et on est toujours là... Depuis une année, on est en attente. L'argent que nous avions mis de côté pour ce projet de voyage fond bien plus vite en Suisse mais on voulait pas reprendre un travail parce que tout ça n'était qu'une question de quelques mois. En plus, ce n'est pas vraiment le bon moment pour chercher du travail... Le départ qu'on imaginait proche semble s'éloigner de plus en plus.

En partant en 2019, je disais que la seule chose que je ne voulais pas était de revenir et retrouver ma vie d'avant, sans changement. C'était ma plus grande peur. Au plus profond de moi-même, je refusais de me résigner à retrouver ma vie d'avant. Je voulais faire tellement de choses pendant ce voyage ! J'avais des objectifs personnels, je voulais réfléchir et trouver une nouvelle voie, j'ai cru avoir largement le temps... mais je n'en ai pas eu assez pour la trouver. Comme le temps passait, je me sentais de plus en plus frustrée. Déprimée. Je n'arrêtais pas de me dire qu'on ne devrait pas être là. Que tout ça était tellement injuste. Plus le temps passait, plus la colère de l'impuissance m'envahissait et moins je voyais la suite... il faut qu'on trouve une solution pour gagner de l'argent, tout en restant géographiquement libre. J'ai des idées, mais rien ne marche pour l'instant. J'ai l'impression de me débattre comme un oiseau en cage qui veut juste tout casser pour se libérer de sa prison. J'ai envie de crier, de pleurer, tellement je suis désespérée de cette situation qui influence notre vie depuis un an et dont je ne vois pas la fin. Je sais, ne pas pouvoir voyager est loin d'être un gros problème. Ça peut même vous sembler ridicule ou carrément agaçant. Je le comprends. Tellement de gens vivent de situations tellement plus dures ! Beaucoup de gens ont perdu tellement plus que juste quelques rêves... Nous, on est en bonne santé. On a une maison. On ne manque de rien. On n'a pas le droit de se plaindre. Et pourtant, je me sentais tellement frustrée d'avoir été coupée dans mes projets par quelque chose qui ne dépend pas de moi et contre quoi je ne peux rien faire que j'avais du mal à voir du positif là-dedans. Jusqu'au jour où je me suis dit que cela ne pouvait pas continuer comme ça. Il fallait que je change d'attitude, que je me trouve de nouveaux objectifs sinon j'allais devenir folle en pensant seulement à ce que je ne pouvais plus faire. D'abord, j'ai commencé de faire de la méditation. Ça m'aide. Ça me détend. Ça me permet de me changer les idées, de penser à autre chose. Puis j'avais besoin de nouveaux projets que je peux réaliser indépendamment de la situation dans le monde. Je fais de la peinture. J'écris. Je perds du poids. Mon livre On m'a interdit de t'aimer vient d'être publié chez Lys Bleu Editions 😃(d'ailleurs, vous pouvez réserver votre exemplaire sur le site de l'éditeur ou encore mieux, directement chez moi!)



J'ai commencé de faire du jardinage. Je suis totalement débutante et je n'y connais rien, j'apprends. Mais je me réjouis de pouvoir récolter mes propres fruits et légumes. J'ai envie d'être plus proche de la nature. Moi qui suis une vraie citadine, qui a toujours adoré trainer dans les magasins, je les évite autant que possible maintenant. Vue ce que la société est devenue aujourd'hui, j'ai juste envie de m'en éloigner, devenir de plus en plus autonome et de moins en moins dépendre d'elle. L'un de nos objectifs de voyage était de passer du temps en famille : finalement, on n'a pas besoin d'être à l'autre bout du monde pour en profiter. Pour nous concentrer sur notre couple, sur nos enfants. Profiter au mieux de ce temps qui file si vite, avant qu'ils ne deviennent adolescents et finissent par nous quitter un jour. J'ai juste envie d'apprécier le présent, chaque jour et chaque instant auprès des personnes que j'aime. Séb a commencé de faire des briquets uniques et personnalisés. Ses créations sont vraiment magnifiques!! Même si cela ne nous permet pas encore d'en vivre, je crois qu'il a toutes ses chances de réussir 🤞🤞🤞 Vous trouverez toutes les informations sur son site Manufacture FS Créations 😍



Comme vous voyez, on ne manque pas d'idées et de projets. Pour l'instant, tout cela est assez brouillon et pas encore vraiment abouti, on cherche encore notre voie... mais il y a de l'espoir! 😜


Aujourd'hui, cela fait un an que notre voyage a été interrompu. Je crois qu'au bout d'un an, je ne peux plus dire qu'on est en attente. Je dois faire le deuil de ce projet et accepter qu'il est bel et bien fini. C'est dur, mais je m'oblige à penser plutôt à la chance qu'on avait de pouvoir vivre ces 9 mois incroyables !

Notre camping car nous attend toujours près de Las Vegas et je crains qu'il devra attendre encore un bon moment. J'ai du mal à être optimiste concernant les voyages dans la situation actuelle, mais j'espère de tout coeur qu'un jour tout cela prendra fin et qu'on pourra commencer une nouvelle aventure, retrouver notre maison roulante et visiter encore plein d'endroits magnifiques dans le monde.



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